Les Ombres de Torino : le futur imaginé par Arnaud Duval se déploie [chronique]

chronique de roman science-fiction anticipation hard-scienceIl y a un an déjà, je faisais la chronique des « Pousse-Pierres » d’Arnaud Duval, un roman de science-fiction que j’avais beaucoup aimé (le jury du prix Futuriales 2012 aussi !). L’auteur nous proposait une belle aventure en 2170, entre la Terre, la station orbitale Eloane et la ceinture d’astéroïdes du système solaire. Le tout bourré de suspense !

Puis, j’ai lu la suite : « Les Ombres de Torino » . Je l’ai beaucoup aimée, avec toutefois un petit bémol.

Ce que j’ai beaucoup aimé dans ce roman

Dès le début de ce Torino 2, on retrouve parfaitement le cadre SF posé dans le tome 1, grâce à d’habiles rappels en cours de lecture. C’est la richesse et les nuances des 3 communautés en présence qui font la saveur de l’univers d’Arnaud Duval :

  • la société libertaire des Lagrangiens qui vivent en orbite dans une station géante nommée Eloane et imposent un blocus spatial aux Terriens. Ils ont payé le prix fort pour cela dans le tome 1.
  • le monde complexe des Terriens et les luttes intestines qui agitent leur sphère politique et économique. Cantonnés de mauvaise grâce sur leur planète et ayant hérité de Mars (cadeau empoisonné ?), certains conspirent, avides de liberté et de pouvoir.
  • la communauté des Spatieux qui cherchent à rester en dehors du conflit qui couve entre la Terre et Eloane, mais bon… pas facile quand on est aussi à l’affut des possibilités de profit et qu’il n’y a pas de véritable chef !

La situation est très tendue suite au dénouement final du tome 1. Elle n’est pas sans me rappeler le « diktat » imposé aux Allemands après la Première Guerre mondiale, traité de paix déséquilibré qui a, en partie, planté les graines de la Seconde GM. En effet, pour les problèmes qu’ils ont causés, les Terriens ont hérité de la délicate mission de terraformer Mars (objectif déjà abandonné par le passé en raison de sa difficulté) et c’est vraiment vécu comme une « punition » … Sauf qu’ils vont mettre la main sur un drôle d’artefact extra-terrestre qui risque bien de changer la donne !

couverture Les Ombres de Torino d'Arnaud Duval Editions du Riez

J’ai été très content de retrouver les personnages du tome 1. Tout d’abord Maureen, la Spatieuse orpheline, qui a grandi et a enfin réussi à payer sa dette. Cela fait plaisir pour elle ! Toujours aussi effrontée, elle a maintenant des velléités de devenir capitaine de son propre vaisseau. Ambition qui la catapulte vers Mars…

Ensuite, Richard, le Terrien devenu Lagrangien, et son robot Dyna… jusqu’à ce que je m’aperçoive, déçu, qu’ils ne joueraient qu’un rôle très mineur dans cet opus. Dommage, j’avais trouvé Richard très attachant dans le tome 1, d’autant qu’il avait suivi une belle évolution psychologique. Peut-être aura-t-il droit à une place plus importante dans un tome 3 ?

Et puis, la découverte de 2 nouveaux personnages, des Terriens : Jérémy, un jeune cadre un peu prétentieux de chez Domelta, et Marie, sa nouvelle secrétaire. Pris dans la lutte de pouvoir qui agite les dirigeants des corporations terriennes, ils se retrouvent eux aussi en route pour la planète rouge sur laquelle ils se trament des choses pas claires autour de l’artefact.

Concernant ce dernier point (l’intrigue), l’auteur a vraiment réussi avec brio à accrocher ma curiosité, en mêlant mystère inquiétant et informations distillées au goutte à goutte, mais qui nous permettent tout de même avoir une petite longueur d’avance sur les personnages… (ce qu’Yves Lavandier appelle l’ironie dramatique)

 

Arnaud Duval : Les Pousse-Pierres et Les Ombres de Torino Après les communautés humaines, les personnages et le suspense, une autre des réussites du roman est l’aspect technologique du monde inventé par l’auteur. On se retrouve encore une fois projeté dans un univers futuriste très réaliste et très concret. On sent que ce monde est possible et pas si loin de nous que ça… Je me demande dans quelle mesure sa profession (architecte logiciel) l’a aidé à concevoir tout cela 😉

Les relations entre les humains et les robots sont moins mises en avant que dans le tome 1, notamment à cause de l’absence de Dyna, mais Beppie a toujours une relation aussi amicale et savoureuse avec Maureen. C’est une vraie personne.

Jérémy se retrouve doté d’une IA pour l’assister, mais j’ai trouvé dommage qu’elle ne soit pas davantage exploitée, davantage présente. Elle est plus froide, plus distante, plus utilitaire que Dyna ou Beppie… plus Terrienne en somme ! Eh oui, ceci est cohérent avec les bases que l’auteur a posées dans le tome 1 : les Lagrangiens sont des cracks pour concevoir des IA évoluées, mais pas les Terriens (quoique…).

 

Le bémol de ce tome 2 de Torino

Dans cet opus, vous verrez qu’il y a beaucoup de scènes très courtes. Parfois, elles montrent des actions ou décisions des personnages principaux, parfois celles de personnes que l’on ne reverra pas mais qui ont un impact sur l’intrigue ou sur la situation globale. Je vois 2 conséquences majeures à cela :

  1. D’un côté, cela est très efficace pour le rythme, on a pas le temps de s’ennuyer, ça s’enchaîne rapidement et on est toujours en train de se demander comment ou quand ça va déraper ou comment ils vont s’en sortir ^^
  2. Mais, d’un autre côté, cela a eu pour effet que je me sente loin des personnages principaux. J’ai eu le sentiment de partager moins de choses avec eux que dans le tome 1. Ce n’est pas un problème pour ce qui est des méchants conspirateurs, mais c’est un peu dommage pour les gentils, notamment pour Jérémy que l’on ne connaît pas et qui est moins charismatique que Richard dans Torino 1 (auquel on s’identifiait facilement, puisqu’il était un Terrien déraciné découvrant l’espace). En effet, Jérémy a un côté prétentieux et pas très cool avec sa secrétaire qui, même si on compatit face à la mouise dans laquelle il se retrouve, ne suffit pas à le rendre moins antipathique. Pourtant, sa personnalité est parfaitement cohérente avec son métier et ses ambitions, il ne s’agit donc pas d’un défaut de conception du personnage ni d’un problème de mise en scène.

Toutefois – et heureusement ! –, cela n’empêche pas de s’engager à la suite de Jérémy dans l’enquête qu’il doit mener, d’autant qu’il va, comme Richard en son temps, évoluer au cours du roman et devenir un peu plus sympathique ! Mais je n’en dis pas plus… Je vous laisse découvrir (la fiche Amazon se trouve ici).

 

Arnaud, si tu m’entends, à quand un Torino tome 3 ?

2 réflexions au sujet de “Les Ombres de Torino : le futur imaginé par Arnaud Duval se déploie [chronique]”

  1. Oh oui ! A quand le tome 3 !
    J’ai beaucoup aimé les livres ; je les ai dévoré.

    Je partage ton avis sur le deuxième tome. Je suis resté sur ma faim dans la construction des personnages. J’aurai aimé avoir plus d’information et me sentir plus proche d’eux.

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    • Bonjour Acharat,
      Merci pour ton commentaire ! Il y a des chances qu’on retrouve Jérémy dans un tome 3 et qu’on en apprenne davantage sur lui 😉 Et peut-être aussi Richard et Maureen.
      A bientôt,
      Jérémie

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